« Peut-être 2019 », « L’anniversaire en 2011 », « L’annonce du cancer », « Les 80 ans de Nana »… Cela faisait deux semaines que Dana est aux prises avec un monologue interne. Deux semaines également qu’elle fonctionne en pilote automatique, suivant à la lettre LA to-do list. La veille de l’enterrement, elle avait prémédité de s’enfuir dans la maison familiale pour éviter les condoléances, les anecdotes sur sa défunte mère, et ces visages qui avaient disparu pendant les trois séances de chimiothérapie. Un stratagème qui s’était révélé inutile, d’abord au funérarium, et maintenant à la réception où son père est le centre de l’attention.

Déambulant entre la cuisine et le salon pour s’assurer que les invité·es ne manquent de rien, Dana, que tout le monde décrit comme une « fille à papa », rumine la rancœur qu’elle éprouve pour son père : rien n’y fait, même si le voir ainsi perdu et déboussolé dans cette maison qu’il lui faudra habiter seul après trente-cinq ans de mariage fait naître en elle un soupçon de compassion. 

Lire la suite sur Manifesto XXI

L’an dernier aux États-Unis, le rappeur Tory Lanez a été jugé pour avoir tiré sur la chanteuse Megan Thee Stallion. En janvier, en Grande-Bretagne, le footballeur français Benjamin Mendy a été jugé pour dix accusations de viol et d’agression sexuelle. Lanez a été reconnu coupable en décembre, Mendy non coupable dans huit des dix accusations tout en restant poursuivi pour deux accusations, un viol et une tentative de viol.

Dans les deux cas, les procès et les verdicts ont donné lieu à d’importants débats et confrontations sur les réseaux sociaux, avec des attaques misogynoir (1) ciblées contre les Black Feminist et les afroféministes (2) anticarcérales. Au cœur de ces attaques, l’utilisation des féminismes noirs à des fins de récupération.

Lire la suite sur Politis ici

Au programme du #2 de la série “Des amis qui vous veulent du bien” : incompétence stratégique, charge mentale, division du travail domestique dans le couple et recours aux travailleuses domestiques migrantes, le tout analysé avec les recherches de la sociologue Rose-Myrlie Joseph.

19h27
« Je suis là, je suis là ! » Triomphante, Chloé dévale l’escalier. Bien que ce soit une bataille quotidienne, la victoire sur le coucher n’est jamais assurée. Laure et Julien affichent un air déçu de ne pas voir leurs filleuls ce soir.

19h39
La commande du traiteur thaïlandais du coin de la rue arrivée à 19h17 peut enfin être entamée et la discussion prend son rythme :
Laure : Là on a encore une merde avec le toit, et les devis sont ridiculement chers.
Julien : On va finir par le faire nous-mêmes, en regardant des tutos sur YouTube.
Chloé : Au cabinet, on a un client qui a une entreprise de rénovation, je peux lui en toucher deux mots et voir s’il peut vous faire un prix.
Julien : Tu es sûre, ça ne te pose pas problème ?
Chloé : Mais n…
« Bien sûr que non, en plus c’est pas tous les jours que les cabinets comptables peuvent faire du pro-bono », interrompt Paul d’un ton jovial.
Chloé : Je lui en parle demain… Ohlala si vous saviez ! Son dossier est un casse-tête, il…
Paul, lui passant la main sur le dos : « Chouchou, jeudi soir, pas de casse-tête au programme. » Il ponctue la phrase par une bise dans le cou et poursuit : « J’ai pas trouvé la sauce vietnamienne. »
Chloé se lève pour prendre la sauce.

19h58
Chloé est de retour à table avec la sauce qui se trouvait dans le placard des sauces.

Lire la suite sur Manifesto XXI

L’absence de femmes dans la catégorie la plus prestigieuse des Césars, « meilleur film », à la 48e cérémonie des Césars, a très vite été éclipsée par le grand gagnant, La Nuit du 12 de Dominik Moll, nominé dix fois et reparti avec six récompenses, dont celle du meilleur film. On y suit deux inspecteurs de la police judiciaire, enquêtant sur le viol et le meurtre de Clara (Lula Cotton-Frapier).

Lire la suite

Valentin n’aurait jamais pensé que la sortie tant attendue de son premier livre, tiré de sa thèse, serait le point de départ de la plus grande injustice qu’il aurait à subir dans sa vie. Il ne cesse de lire et relire l’unique recension, rien ne lui a été épargné, dans cet article  réalisé par une « parfaite inconnue, sans autorité dans la matière ». Comment cette personne pouvait-elle sérieusement qualifier son ouvrage de « limite de masculinisme ? ».

Valentin aime les livres. Dans son groupe d’amis, il jouit du qualitatif d’intellectuel, qu’il feint de nier, mais ses petits gloussements cachent mal le plaisir que ce titre lui procure. Il aime les livres, les commenter, en débattre et les recommander, ou plutôt les prescrire. Un livre pour chaque problème, et un problème pour chaque livre. Et comme tout amoureux des livres, de la Culture, la liste des choses qui le révolte reflète son sens certain de la morale et du beau: les liseuses électroniques, la musique avec « des paroles qui ne font pas sens », les personnes qui jettent les livres, celles qui lisent des ouvrages indigents : succès commerciaux, arlequins, mangas (liste non exhaustive), les personnes qui n’ont pas lu les sept tomes de la Recherche du temps perdu, mais aussi celles qui ont gaspillé leur temps à lire tous les tomes du Seigneur des anneaux, les blockbusters, les personnes qui ne savent pas prononcer correctement Durkheim ou Brecht.

Lire la suite sur Manifesto XXI

On January 14th, Alice Diop was presenting her most recent film at the NYC Film Forum and the Africa Center. Critics and international festivals have praised Alice Diop’s first feature film for its cinematography, narrative, and acting. After earning the Lion of the Future and the Golden Lion at Venice, Saint Omer won the César of best first film at the 48th César ceremony on Friday, February 24. Saint Omer displayed a lexicon of shadowiness mastering the art of fragments—a cinematographic embodiment of Saidiya Hartman’s ‘critical fabulation’ methodology coined in her essay “Venus in Two Acts.”1 Although Saint Omer cannot be reduced to an “inspired by real-life” film, the film offers an acute awareness of Black subjectivities, silence, and its shadows.

Read more.

Décolonial, colonialité, décoloniser… Soixante ans après la deuxième vague d’indépendances nationales, la question décoloniale est toujours (voire encore plus) d’actualité. Depuis des dizaines d’années, militant·es et universitaires démontrent qu’en termes économiques et géopolitiques les pratiques coloniales n’ont pas disparu : elles se sont recomposées et adaptées au contexte post-indépendance.

La Françafrique et les relations cordiales (et très intéressées) entre la France et ses anciennes colonies n’est pas morte, comme en témoignent les interventions militaires françaises dans le Sahel ou la survivance du franc CFA.

Lisez la suite ici.

Since its emergence in the French context, academics and activists have clashed over the definition of “intersectionality,” but also intramurally within those spaces where questions of legitimate forms of knowledge remain a point of contention. In this paper, I will map the paradoxical circulation of intersectionality by focusing on how the concept participated in the shaping of both alliances and antagonisms amongst and between activist organizations, academia, mainstream political groups, and the French State. This same intersectionality, which has given birth to significant intellectual channels of debate among scholars, feminists, and anti-racist activists (but also between scholars and activists), is nevertheless presented as a homogeneous and unified object. There exists another paradox: anti-racist and leftist political activists criticize intersectionality, arguing that it can be co-opted by neoliberalism or femonationalism. Yet the reality is that the reconfiguration of reactionary discourses in France has recoded intersectionality to mean “Islamist fundamentalism/racialism/anti-universality.”

Read more here.

Juillet 2018 : Victoire de l’équipe de France à la Coupe du monde de Football. De jeunes garçons noirs quittent la périphérie pour rejoindre le centre, drapeau tricolore à la main. Ils s’engouffrent dans le RER, direction Paris. Leurs visages rivés sur les écrans géants, à l’extérieur du bar, l’exultation avec la foule et toujours ce drapeau tricolore brandi, enlacé et agité. Une scène qui renvoie à l’affiche du film, ces mêmes drapeaux portés par une foule qu’on devine multiethnique, déferlant sur les Champs Élysées, surplombée par ce titre : Les Misérables. Tourné à Montfermeil, le film se place sans équivoque dans la lignée de la figure tutélaire de Victor Hugo, grand témoin de son époque et narrateur des marges. Avec cette scène qui inaugure Les Misérables, le film n’évoque pas simplement le symbole de la francité en explorant la dualité entre celles et ceux supposés de souche et les autres. Ces trois premières minutes cristallisent fantasmes, espoirs et projections autour de la question raciale en France.

Les Misérables — qui a fait sensation en remportant un prix à Cannes et quatre Césars, dont celui du meilleur film — a été salué à gauche comme à droite.

Lire la suite sur Atoubaa

I am glad to be part of The Funambulist issue 25, I wrote the piece about Haiti’s post-dictatorship generation fights corruption.

Thanks to Léopold Lambert for invitation and Channelle’s translation.
Photo : Ralph Thomassaint Joseph

Visit the website to order this issue copy but also dope previous issues : https://thefunambulist.net/

“The Funambulist is a print and online magazine dedicated the politics of space and bodies initiated in 2015. Every two months, it proposes to its readers spatial perspectives on political anticolonial, antiracist, queer, feminist and/or antiableist struggles in various scales and geographies of the world, written by our fantastic contributors”