Valentin n’aurait jamais pensé que la sortie tant attendue de son premier livre, tiré de sa thèse, serait le point de départ de la plus grande injustice qu’il aurait à subir dans sa vie. Il ne cesse de lire et relire l’unique recension, rien ne lui a été épargné, dans cet article  réalisé par une « parfaite inconnue, sans autorité dans la matière ». Comment cette personne pouvait-elle sérieusement qualifier son ouvrage de « limite de masculinisme ? ».

Valentin aime les livres. Dans son groupe d’amis, il jouit du qualitatif d’intellectuel, qu’il feint de nier, mais ses petits gloussements cachent mal le plaisir que ce titre lui procure. Il aime les livres, les commenter, en débattre et les recommander, ou plutôt les prescrire. Un livre pour chaque problème, et un problème pour chaque livre. Et comme tout amoureux des livres, de la Culture, la liste des choses qui le révolte reflète son sens certain de la morale et du beau: les liseuses électroniques, la musique avec « des paroles qui ne font pas sens », les personnes qui jettent les livres, celles qui lisent des ouvrages indigents : succès commerciaux, arlequins, mangas (liste non exhaustive), les personnes qui n’ont pas lu les sept tomes de la Recherche du temps perdu, mais aussi celles qui ont gaspillé leur temps à lire tous les tomes du Seigneur des anneaux, les blockbusters, les personnes qui ne savent pas prononcer correctement Durkheim ou Brecht.

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Juillet 2018 : Victoire de l’équipe de France à la Coupe du monde de Football. De jeunes garçons noirs quittent la périphérie pour rejoindre le centre, drapeau tricolore à la main. Ils s’engouffrent dans le RER, direction Paris. Leurs visages rivés sur les écrans géants, à l’extérieur du bar, l’exultation avec la foule et toujours ce drapeau tricolore brandi, enlacé et agité. Une scène qui renvoie à l’affiche du film, ces mêmes drapeaux portés par une foule qu’on devine multiethnique, déferlant sur les Champs Élysées, surplombée par ce titre : Les Misérables. Tourné à Montfermeil, le film se place sans équivoque dans la lignée de la figure tutélaire de Victor Hugo, grand témoin de son époque et narrateur des marges. Avec cette scène qui inaugure Les Misérables, le film n’évoque pas simplement le symbole de la francité en explorant la dualité entre celles et ceux supposés de souche et les autres. Ces trois premières minutes cristallisent fantasmes, espoirs et projections autour de la question raciale en France.

Les Misérables — qui a fait sensation en remportant un prix à Cannes et quatre Césars, dont celui du meilleur film — a été salué à gauche comme à droite.

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Octobre 2018. Nice Simon, mairesse de Tabarre1, porte plainte et organise une conférence de presse où elle déclare, photo à l’appui, qu’elle a été battue et séquestrée par son compagnon, l’homme d’affaires Yves Léonard. Un mandat d’arrêt est émis à l’encontre de ce dernier. Il n’est pas arrêté, et bien que des photos de lui dans des lieux connus de la capitale circulent, il ne semble pas plus inquiété que cela. Janvier 2019. Le mandat d’arrêt contre Yves Léonard est annulé et les faits sont requalifiés en simple délit. À la suite d’une interview accordée par Nice Simon au média en ligne Ayibopost2, Léonard annonce qu’il va donner une conférence de presse pour faire la « lumière sur Nice Simon ». Impossible de saisir le sentiment d’impunité qui habite Monsieur Léonard sans une information clé : ce dernier est un proche de l’actuel président de la République Jovenel Moïse, ainsi que du Premier ministre Jean Henry Ceant. Il est par ailleurs propriétaire de la villa que loue le Président. L’origine de la fortune d’Yves Léonard n’est pas connue et fait l’objet de vives et constantes rumeurs d’activités illégales.

Être une activiste afroféministe s’inscrivant dans l’anticapitalisme est un exercice à double emploi, notamment en matière de pratiques militantes. Il s’agit d’une part, de défendre ses activités contre les attaques réactionnaires teintées de mépris et de l’autre, de continuer à développer des critiques constructives pour faire avancer nos luttes.
La notion d’espace “safe” ne peut échapper à ces critiques.

Un espace safe, ou espace sécuritaire en bon français, vise à l’élimination de la violence dans les interactions entre les membres ; notamment ceux appartenant à des groupes sociaux marginalisés dans la société. Mais est-ce vraiment possible ?

La violence règne sans ambiguïté, et de manière hégémonique, partout dans la société. Les groupes Facebook, forums ou espaces se définissant ou se voulant “safe”, même avec toutes les dérives libérales, ne peuvent ainsi pas retirer un “droit” à des personnes ayant des propos violents ou oppressifs. Ces derniers vont pouvoir continuer à les exprimer, les entendre, les lire et les partager en ligne, au travail, dans l’institution scolaire, dans les médias, le gouvernement, ou dans la rue.

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Le numéro d’Enquête exclusive consacré aux « Africains de Paris » a suscité de vives critiques de la part de noirs résidant en France. Nous sommes également agacés (quoique pas surpris) par cet énième documentaire qui a pour but d’analyser des immigrés ou enfants d’immigrés par le prisme de leur « intégration » réussie ou non (selon les critères de qui ?).

Nous nous méfions déjà de Bernard de la Villardière que sa réputation précède quant à son regard plein de mépris et de préjugés sur les populations issues de l’immigration vivant en banlieue.

En clair, nous n’attendions rien de bon de ce documentaire, et n’aurions certainement pas pris la peine de le critiquer en temps normal. Ce qui nous incite à prendre la parole, et nous inquiète, ce sont les critiques – du moins les plus entendues – formulées par certains noirs sur les réseaux sociaux.

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Chaque semaine, je vois passer statuts et tweets de personnes qui se disent déçues du militantisme. Ce qui est normal quand on approche la chose comme une bulle. Mais le milieu militant, comme le monde du travail, la famille, les groupes d’ami·e·s, n’est pas une bulle en dehors de la société. Il est traversé par des conflits d’intérêts, des rapports de pouvoir et plus important : Ce sont des êtres humains qui le composent. Parfois (pas souvent), on arrive à une résolution politique des conflits, parfois (trop souvent) on politise des conflits qui sont personnels.

Personnellement, je pense qu’il est très important de pas confondre ami·e·s et camarades de lutte (j’utilise ici le mot camarade, même si ça fait gauchiste, pour éviter la confusion avec les terme sœurs/frères qui sont beaucoup utilisés dans les milieux militants décoloniaux), et ce même quand une personne peut être les deux pour vous. J’ai des ami·e·s qui sont également des camarades, mais je sais dans quel contexte ces personnes sont des camarades car nous militons dans des collectifs ensemble. Et dans ces collectifs, un certain nombre de choses (le vote, la prise de parole, l’agenda politique) pose des cadres à nos interactions, et permettent aussi que je sois camarade avec des personnes qui ne sont pas mes ami·e·s et qui ne sont pas voué.e.s à le devenir. J’ai des ami·e·s qui ne sont pas des camarades, qui ne sont pas politisé.e.s et nous le vivons très bien aussi. J’ai des ami·e·s qui sont politisé.e.s mais pas militant.e.s avec qui on peut se retrouver dans des espaces militants.

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Dans le cadre du processus de #LiberAction visant à corriger les erreurs factuelles, les déformations et insinuations douteuses du dernier dossier « antiracisme » de Libération, nous avons décidé de réécrire tous les articles. Le portrait de Fania Noël, paru dans le dossier du 4 avril 2016, a ici été retravaillé. Le choix a été fait de ne pas donner de détail sur son physique, sa tenue ou sa coiffure car c’est définitivement son positionnement politique qui nous intéresse.

Avant de s’engager avec Mwasi, l’afroféministe avait claqué la porte de plusieurs mouvements. Car contrairement à eux, elle voulait “l’abolition du système de domination et pas seulement sa réforme”.

Sur son carnet, un sticker avec une citation d’Assata Shakur (militante afro-américaine exilée politique à Cuba, membre du Black Panther Party et de la Black Liberation Army) : “Personne dans le monde, personne dans l’histoire n’a jamais obtenu sa liberté en faisant appel au sens moral des gens qui les opprimaient.” Fania Noël, 28 ans, l’aînée (la seule ayant fait des études universitaires) d’une fratrie de six est née en Haïti et a grandi à Cergy (Val-d’Oise). Son père, retourné par lassitude dans son pays d’origine, a eu différents boulots dans la restauration. Pour décrire ses maladies à répétition, elle cite Foucault : « c’est le pouvoir qui s’est inscrit dans son corps. »

 

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Dans un contexte de mondialisation, où l’ancienne puissance impériale a perdu sa première place dans le soft power au profit des Anglo-saxons, les anciennes colonies françaises sont celles qui font exister le français en dehors de la France. Ce n’est ni le Québec ni la Belgique qui permettent à la langue française d’être dans toutes les instances internationales, mais bien les pays d’Afrique et de la Caraïbe. Lors d’une conférence sur l’entreprenariat, un éminent conseiller politique français se réjouissait que le français devienne l’une des langues les plus parlées au monde grâce à la démographie africaine. Il a notamment mis en avant le potentiel immense que représenteraient pour la France les contrats de marchés publics, concernant en particulier les centres d’appels avec des salarié-e-s très bon marché. C’est de cela dont il s’agit aussi, la domination culturelle est l’un des secteurs du capitalisme néo-libéral.

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Depuis quelques semaines, la polémique enfle autour du projet de camp d’été décolonial porté par Sihame Assbague et Fania Noël. En cause, la non-mixité politique de l’événement, choisie et revendiquée par les militantes. Après avoir essuyé de nombreuses critiques et attaques diffamatoires, et pour répondre aux nombreuses interrogations des premiers concernés, elles se sont lancées dans la rédaction d’un dialogue fictif avec elles-mêmes.

Pourquoi déjà avoir choisi de créer ce camp d’été décolonial ?

L’idée de ce camp est née d’un échange sur la nécessité de multiplier les espaces de transmission, de rencontres et de formation politique. Il en existe déjà ; ils font écho à une longue tradition d’organisation autonome des immigrations et des quartiers populaires. Les anciens, comme notre génération d’ailleurs, n’ont jamais attendu qu’on vienne les sauver. Ils se sont engagés, ont milité et résisté sur tous les fronts. C’est important de rappeler ça car tout militant est l’héritier de luttes passées et même en cours. On connaît très mal cette Histoire, on en sait très peu sur ces luttes et leurs enjeux. Du coup, l’un des objectifs du camp d’été c’est justement de se réapproprier tout ça. Il s’agit également de poser des termes sur ce que nous vivons et de partager méthodes et savoirs, qu’ils soient théoriques ou pratiques. En tant que militantes autodidactes, nous savons à quel point certains concepts ou certaines techniques peuvent paraître abstraits, complexes, etc…et puis, de manière générale, on a toujours besoin de creuser ce que l’on croit savoir (nous les premières), de se confronter à d’autres pensées, d’autres prismes, d’autres réalités.

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Après le dossier de Libé sur l’antiracisme, des pendules devaient être mise à l’heure c’est ce qu’on à fait avec Sihame Assbague :

Politisés et impertinents, actifs sur les réseaux sociaux et remontés contre la gauche des droits de l’homme (mais pas qu’elle)… la génération post-Touche pas à mon pote, née de l’immigration, clive et suscite l’inquiétude des antiracistes universalistes & du pouvoir blanc. Libération, qui lui consacrait un dossier spécial ce lundi 4 avril 2016, s’étant royalement planté, nous corrigeons ici ses erreurs. Sans rancune Libé mais la prochaine fois qu’on doit faire le taf, payez-nous au moins 🙂

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